La religion est aisée

Allah Majestueux et Noble dit à son Prophète Mohammed : Nous ne t’avons envoyé qu’en miséricorde pour l’univers [21;107] et celui-là confirme cela, sans prétention ni vanité, en disant : Je ne suis qu’une miséricorde offerte [Al Hakim, Sahih]. Ce verset caractérise l’esprit de l’Islam. Ce n’est pas pour accabler le genre humain qu’Allah a envoyé Mohammed et a révélé sur lui le Coran, mais ce n’est que par miséricorde, bonté et pitié envers « les mondes » (al ‘alamin) : humains, jinns, et animaux, mâles et femelles, croyants et incroyants. L’Islam, son Prophète et sa Loi sont une grâce pour tous. 

Dans un autre verset Allah décrit Mohammed comme le prophète qui recommande le bien, proscrit le mal, rend licite les bonnes choses, interdit les mauvaises, et ôte les fardeaux et les jougs qu’ils supportaient [7;158]. Fardeaux et jougs qu’ils supportaient du fait des trop nombreuses questions qu’ils posèrent à leur prophète d’une part, et du fait des innovations ajoutées par certains de  leurs religieux d’autre part : Ce monachisme qu’ils inventèrent, Nous ne leur avions jamais prescrit, mais simplement de chercher à satisfaire Allah  [57;27].Donc les fardeaux et les jougs n’avaient pas été voulus par Allah, à proprement parler, mais sont apparus comme la résultante du mauvais comportement des hommes. Jésus, que la paix soit sur lui, vint également, avant  Mohammed, pour apaiser quelques unes de ces difficultés : Je confirme ce qui fut révélé avant moi dans la Torah, vous rend licite certaines choses qui vous étaient interdites, et je vous ai apporté des  miracles, craignez Allah et obéissez moi [3;49]. 
 

C’est donc l’éthique des Prophètes, puis, après eux, de leurs héritiers parmi les savants et les imams que de chercher à apaiser les croyants, leur facilitant autant que possible la pratique de leur foi. Néanmoins, si les premiers ont pu parfois abroger des prescriptions Divines, parce qu’Allah le leur avait ordonné, les seconds ne peuvent sous aucun prétexte abroger le moindre commandement prescrit par Allah ou  son Prophète, que le salut soit sur lui

Le but des commandements Divins n’est pas de nous empoisonner la vie, mais au contraire de guérir nos cœurs et de faire vivre nos âmes : Allah ne veut vous imposer aucune gêne, mais simplement vous purifier et parfaire sur vous son bienfait  [5;6] ; Allah veut pour vous la facilité et non la difficulté [2;185] ; Allah  veut vous alléger car l’homme a été créé faible [4;28] ; [Allah] ne vous a  imposé aucune gêne dans la religion [22;78].L’érudit et pieux imam Ibn al Qayyim a défini ainsi la Loi musulmane qu’il étudia méticuleusement toute sa vie : La Loi Divine [Al Chari’a], dit-il, n’est que clémence et sagesse. Sache que toute prescription dans laquelle tu trouveras de la dureté ou de l’idiotie ne fait en réalité aucunement parti de cette Loi, mais n’est que le résultat de la mauvaise interprétation qu’en a faite celui qui n’avait pas à le faire. Il met ainsi le doigt sur l’un des grands fléaux qui a touché notre communauté : l’intrusion de religieux, incompétents, qui expliquent mal la religion, la présente comme difficile, stupide ou insupportable, en font fuir les gens et leur en donnent une mauvaise opinion, qu’Allah nous préserve !

Le Prophète d’Allah, paix et salut sur lui, a décrit l’éthique qui doit être celle de l’imam et du prédicateur lorsqu’il donna ce conseil à ceux de ses compagnons qu’il nomma imams : Expliquez les choses simplement et ne les rendez pas difficiles, attirez [les gens] et ne les faîtes pas fuir, et mettez vous d’accord et ne vous disputez pas [Al Boukhari & Mouslim].
 
Lui-même enseignait la religion simplement et progressivement, et il se décrit, paix et salut sur lui, comme un « enseignant simplificateur»  [Mouslim]. Il cherchait sans cesse à apaiser sa communauté. Lorsqu’Allah lui révéla que nous devions accomplir cinquante prières quotidiennes, sur le conseil de Moïse, et pour apaiser sa communauté, il ‘négocia’ notre charge, poliment et pudiquement bien sûr, jusqu’à ce que nous n’ayons plus à prier que cinq fois par jour. Dans de nombreux hadiths, il dit, paix et salut sur lui : Si je ne craignais d’imposer trop à ma communauté, je lui aurais ordonné de faire telle ou telle chose, comme la prière de la ‘icha au milieu de la nuit [Al Boukhari], ou de se laver les dents avant chaque prière [Al Boukhari], etc. Ce qui signifie qu’il ne voulait surtout pas trop imposer à sa communauté. De même, il s’abstint de répondre à celui qui demandait avec insistance si le hajj devait être accompli chaque année et s’abstint de prier le tarawih à la mosquée certaines nuits de Ramadan afin que cela ne devienne pas obligatoire ; car il savait que pour certains, ce serait insupportable, soit qu’ils n’en auraient pas la force, la santé, ou le temps, ou que leur situation ne leur permettrait pas cela. 

Faire preuve de souplesse sur des points secondaires de la religion, surtout lorsque le contexte le justifie, n’est aucunement du laxisme, si l’on fait par ailleurs preuve d’intransigeance sur les fondamentaux de l’Islam, que sont la foi, l’éthique, la pratique scrupuleuse des obligations et l’abstention des interdits. Nous entendons par ‘faire preuve de souplesse’, le fait d’adopter un avis argumenté plutôt qu’un autre même s’il est moins solide, ou moins répandu, le fait de délaisser un acte souhaitable ou recommandé mais non obligatoire, ou de pratiquer une chose réprouvée mais non interdite. 

De même l’Imam qui cherche par certains de ses avis [fatwas] à apaiser la communauté musulmane dans certaines situations, et qui peut alors s’éloigner de l’avis majoritaire ou traditionnel, ne peut être accusé d’innover [bida’a] ou de ‘suivre ses  passions’. Faire preuve de tolérance et d’ouverture d’esprit dans des sujets qui autorisent cela, lorsque le contexte le justifie, et par miséricorde pour la communauté musulmane, est un signe de sagesse et de savoir. 
Et Allah est plus savant !